• L'oeil à la fenêtre

    Dessin de Claude Nicolas Ledoux pour la saline d'Arc-et-Senans

    Gravure du théâtre de Besançon 
    Claude-Nicolas Ledoux

    Nous sommes environnés de fenêtres. Celles de chez nous, celles de chez les autres que l’on voit par celles de chez nous. Il y a aussi des voiles, des rideaux.
    Et au travers du verre de chez nous puis du verre de chez eux, on voit les gens, les autres. Une image du quotidien de ces autres nous qui ne livre rien de ce qu’ils sont. Ou si peu. Cette frustration cherche extinction : une envie d’achat de jumelles. Pour voir mieux, voir plus. Mais savoir, connaître ? Non. Reste à acquiescer à cette impossibilité.

    Pendant plusieurs années, j’ai observé un vieux monsieur chauve dans sa cuisine. Il n’est plus là. Tristesse d’un départ subi ou départ volontaire pour un autre lieu, d’autres fenêtres ? Je me souviens, cette fenêtre aimantait mon regard, le soir, quand on voit mieux. Puis, je me suis rappelée que dans la maison familiale, par les vitres de la fenêtre de la cuisine, nous voyions, juste au-dessus des tuyas, dans l’imposante maison construite par un entrepreneur en maçonnerie que nous n’avions pas choisi pour construire la nôtre, des mouvements de vie indistincts que ma mère scrutait et commentait souvent. Je regardais aussi, sans véritable intérêt, jugeant futiles et dérangeantes ses enquêtes.
     
    A Milan, une maison-musée, la Villa Necchi-Campiglio, m’a fascinée, mais pas à cause des œuvres exposées ni de son architecture, remarquables. Non, j’ai été aspirée par les fenêtres doubles de la plus belle salle du rez-de-chaussée. Deux fois des fenêtres. Pour voir deux fois, pour cacher deux fois plus ? Parce que, sans voisins, environnés d’un parc, on manque de fenêtres à interroger ? Surtout, pour abriter la vie, entre les deux. L’espace était assez grand pour y poser des pots, permettre à des plantes appréciant un milieu très lumineux et sec de grandir. Dans mon souvenir, il s’agissait de fenêtres à guillotine et avec des carreaux. Je rêvais de les ouvrir pour tâter les plantes. Voir comment elles pouvaient  se sentir « en sandwich », entre les transparences combinées des deux panneaux. Impossible d’ouvrir et impossible à savoir. Les plantes ne nous parlent pas comme on voudrait.
     
    Connaissance par l’œil ?

     

    Note : Ledoux, le rôle de l'oeil


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